Dans nos pays européens, on associe volontiers l'huile de palme à une célèbre pâte à tartiner, la déforestation en Indonésie et donc la destruction de l'habitat des orang-outang ! Un raccourci un peu simple...
C'est quoi l'huile de palme ?
L'huile de palme est extraite par pression à chaud des fruits des palmiers à huile. C'est un ingrédient traditionnel des cuisines d'Afrique.
Son succès actuel est du, entre autres, à un rendement par hectare nettement supérieur aux plantations de colza ou de soja. En effet, pour un hectare cultivé, on obtient 10 fois plus d'huile de palme que d'huile de soja et 6 fois plus dans le cas du colza. Si on voulait donc remplacer l'huile de palme par une autre huile végétale, il faudrait mobiliser beaucoup plus de surfaces agricoles.
Dans quels produits trouve-t-on de l'huile de palme ? Le Nutella mais pas que !
- Dans notre alimentation ! On montre du doigt les produits alimentaires ultra-transformés en pensant aux plats préparés mais elle entre dans la composition de sauces, de biscuits salés et sucrés, de glaces, de chocolats et de certaines margarines. Il y en a vraiment partout.
- Dans les cosmétiques ! D'ailleurs, au XIXème siècle, l'exportation de l'huile de palme de l'Afrique vers l'Europe alimentait la fabrication industrielle de savons. Des dérivés de l'huile de palme ou de l'huile de palmiste sont présents dans des savons, shampooings, gels douche, mousses à raser, mais aussi fonds de teint et mascaras ...
- Dans les "bio-carburants" ! Dans le "biodiesel", la composition en huile végétale (palme, colza ou tournesol) est plafonnée à 7%. En France, après quelques péripéties, le Conseil d'Etat a finalement confirmé en février 2021 l'exclusion de tous les produits à base d'huile de palme des "bio-carburants". En Europe, elle devra se faire progressivement d'ici 2030. Si notre objectif est de réduire les émissions de gaz à effet de serre et notre dépendance aux énergies fossiles grâce aux bio-carburants, j'ai un doute : le remède ne serait-il pas pire que le mal?
Quels impacts sur les terres ? La déforestation en Indonésie mais pas que !
- Les plantations en Indonésie se font encore au détriment de la forêt malgré les engagements internationaux.
- Les plantations en monoculture remplacent les forêts mais aussi les plantations communautaires vivrières. Le plus souvent, les terres (forestières ou agricoles) sont accaparées par des entreprises au nom du développement.
Et l'Indonésie n'est pas la seule concernée, la Malaisie, la Papouasie-Nouvelle-Guinée, la Côte d'Ivoire, le Sierra-Leone, le Cameroun, le Honduras ...
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Quels autres impacts ? La disparition des orang-outang mais pas que !
- La déforestation a un double impact écologique : accélération du déclin de la biodiversité, émission de gaz à effet de serre participant ainsi au changement climatique. Les orang-outang ne sont pas les seuls à perdre leur habitat, d'autres espèces comme les oiseaux du paradis ou paradisier sont eux aussi menacées.
- Il faut aussi considérer les conséquences humaines. Au nom du développement (article du Courrier International sur l'Indonésie plus haut ou celui sur les mamas papoues voir mon précédent article), des Etats; des banques de développement favorisent l'installation de la monoculture des palmiers à huile. Les communautés locales (présentées comme ayant un mode de vie pauvre et non un mode de vie modeste) cèdent leurs terres - forestières et/ou agricoles - sous la pression ou en échange de promesses de progrès pour tous. Les promesses n'engagent que ceux qui y croient. Finalement, n'ayant plus de terres pour leur propre subsistance, les autochtones sont obligés de travailler dans les champs de palmiers à huile ou à l'usine contre de faibles salaires.
Et ce sont principalement les femmes qui se trouvent en première ligne car c'est à elles de nourrir la famille. Auparavant, elles cultivaient un lopin de terre proche du village, cueillaient des fruits, des plantes et des racines médicinales dans la forêt, valorisaient les résidus des noix de palmiers à huile après l'extraction artisanale ... Aujourd'hui, elles ne nourrissent pas leur famille avec le salaire de la plantation, elles doivent donc trouver des revenus complémentaires. Victimes de pression, de harcèlement, de violence, d'abus, elles tentent de réagir en se regroupant pour faire entendre leur voix.
Je retiens une phrase parmi tous les articles lus pour rédiger le mien : "Avant, nous étions pauvres, maintenant nous n'avons plus rien." Là aussi j'ai un doute, sur notre conception du progrès et du développement.
Alors, c'est tout ? L'huile de palme, c'est mal ?
Je vous avais prévenu que ce n'était pas simple. Avec un rendement à l'hectare aussi avantageux, le palmier à huile pourrait-il être un atout écologique ?
Parmi les pistes pour lutter contre la déforestation en Asie, des organisations aident les petits agriculteurs à renouveler leurs champs (après 30 ans environ, le vieillissement des arbres entrainent une perte de rendement). Pendant les premières années de croissance des palmiers, d'autres cultures, de subsistance et/ou de rente, peuvent être intercalées. Ces plantes assurent un couvert végétal, évitent l'érosion du sol, peuvent réduire le recours aux engrais en associant correctement les cultures et améliorent les revenus des agriculteurs.
Un atout humain ?
En Afrique, dans certaines régions où les hommes cohabitent avec les palmiers depuis longtemps, l'extraction artisanale de l'huile de palme pour une consommation locale est un vecteur d'emploi des femmes et de cohésion des communautés.
De plus, avec un rendement tellement plus intéressant que le soja ou le colza, pourquoi ne pas payer décemment les travailleurs dans les plantations et à l'usine ?
Je n'ai pas rédigé cet article pour appeler à boycotter les produits à base d'huile de palme. Comme d'habitude, j'ai voulu tirer sur une ficelle pour en savoir plus et l'armoire m'est tombée dessus. Alors, j'ai écrit pour restituer la complexité du sujet, questionner nos jugements de valeurs et la conception de développement qui s'est imposée à tous (?), pour montrer les souffrances et les combats.
Sources principales :
- Wikipedia
- WWF.com
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