top of page

La forêt et les rivières volantes

Il était une fois une planète où la majorité des habitants ne savaient plus ce qu'était une forêt et ses bienfaits. Quelques scientifiques avaient entrevu son importance, des peuples autochtones avaient tenté de transmettre leur savoir, mais ce n'est qu'à sa disparition que les Hommes commencèrent à comprendre la complexité des processus vivants et physiques de la forêt. Depuis, ils essayaient de reforester. Ils savaient pertinemment que les bénéfices ne se verraient que dans des dizaines, des centaines voire des milliers d'années. Ils avaient retrouvé ce vieux proverbe chinois "Le meilleur moment pour planter un arbre était il y a vingt ans. Le deuxième meilleur moment est maintenant", alors ils persévéraient.


Ils avaient été obsédés par la réduction des émissions des gaz à effet serre, ils ne voyaient les forêts que comme des puits de carbone. Ils n'avaient pas pris conscience de l'importance du cycle de l'eau dans la régulation du climat, de l'importance de la transpiration des végétaux dans le cycle de l'eau.

En voulant agrandir les surfaces agricoles pour nourrir plus de bétails, pour nourrir plus d'Hommes, ils avaient réduit la forêt amazonienne à peau de chagrin. En réduisant sa surface, ils avaient stoppé les rivières volantes qui traversaient la forêt, puis arrosaient la région de Cuiaba à Buenos Aires, de Sao Paulo jusqu'aux Andes, la rendant humide et prospère. Les soucoupes volantes étaient un mythe, les rivières volantes, elles existaient bel et bien, même s'ils ne les voyaient pas de leurs yeux.


Les rivières volantes ! Ces structures longues de plusieurs kilomètres étaient constituées de vapeur d'eau en provenance de l'évaporation des eaux de l'Océan Atlantique et des cours d'eau du continent Sud-Américain ainsi que de la transpiration des végétaux de la forêt. Vous devez imaginer la forêt comme une organisation tridimensionnelle : la surface au sol qu'elle occupait mais aussi toutes les strates de végétaux, depuis le sol jusqu'à la cime des arbres. Toutes ces feuilles transpiraient. Voilà pourquoi la forêt était tellement plus "riche" que les plantations qui l'avait remplacée.

L'Amazonie pouvait transpirer jusqu'à vingt milliards de tonnes d'eau par jour.


Photo de Bob Brewer sur Unsplash


La vapeur d'eau montait dans l'atmosphère, rencontrait des températures plus froides et les molécules d'eau s'agrégeaient autour des particules fines pour former des gouttelettes, puis des nuages. Le vide laissait par l'agrégation des gouttelettes en nuage entrainait une baisse de la pression dans la colonne d'air. La redistribution verticale de l'air sur de larges zones entrainait une chute de la pression dans les zones basses de l'atmosphère. Les masses d'air humide chargées de l'eau évaporée de l'océan ayant une pression plus importante se dirigeaient alors vers les zones de basse pression générant un flux d'air humide vers la forêt.

Et pour ajouter à l'élégance du phénomène naturel, les fines particules autour desquelles les molécules d'eau s'agrégeaient pour former les gouttelettes étaient émises par les plantes et les champignons de la forêt. Tous les ingrédients pour générer la pluie étaient présents dans la forêt.

"C'est dans un désert américain, que je réalisais soudain que la pluie de tombe pas des cieux ; elle provient du sol. La formation des déserts n'est pas due à l'absence de pluie ; mais plutôt la pluie cesse de tomber parce que la végétation a disparu." Masanobu Fukuoka


Sans les arbres de la forêt, les rivières volantes s'étaient taries. On tenta de remplacer la pluie par l'irrigation mais cela ne dura pas, la savane puis le désert s'imposa. Seule restait l'amertume de ne pas avoir compris plus tôt que la vie de la forêt et le cycle de eau étaient intimement liés.

Pour ne pas oublier au fil du temps l'importance de la reforestation qu'ils avaient commencée, chaque année, ils commémoraient la forêt le 21 mars et l'eau le 22 mars.





Cette fable m'a été inspirée par le visionnage du film "Les mystères des rivières volantes d'Amazonie" d'Arte. Merci à la webconférence de Samuel Bonvoisin "Et si on pouvait cultiver l'eau ?" pour les Shifters Switzerland qui a motivé mon intérêt pour le sujet.

Si vous avez moins de temps, une vidéo de quelques minutes a été réalisée par Geo à l'occasion de l'exposition sur les rivières volantes à Aquatis à Lausanne en 2019.

Posts récents

Voir tout
bottom of page